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vendredi 27 juillet 2018

La souveraineté numérique


Dans le domaine de la souveraineté numérique, il nous faut lucidement regarder la situation dans laquelle nous nous trouvons, nous européens et nous français bien sûr dans le domaine de la souveraineté numérique.
Nous avons avec constance échouée à devenir une puissance numérique.
Nous avions le premier fabricant mondial de téléphones Nokia. Il a été démantelé en l'espace de cinq ans.
Nous avions de grands opérateurs dans pratiquement tous les domaines des technologies.
Aujourd'hui l'essentiel des technologies clés pour l'avenir, qu'il s'agisse des technologies cloud, de l’intelligence artificielle, des nanotechnologies et nous pourrions continuer la liste nous européens n'existons pas
Nous avons de bons cerveaux. Mais ils participent grandement à l'édification des GAFA par exemple en intelligence  artificielle. Et nos cerveaux se font très largement aspirer par la Silicon Valley et par les BATX Chinois.
Nous n'existerons pas tant  que nous n’aurons pas d'existence industrielle.
Toute forme de réflexion politique, stratégique sur l'indépendance ou la souveraineté n'aura de sens que si elle s'appuie sur un renouveau industriel. Or pour l'instant il n'existe pas.
L'objectif n'est pas de dresser un tableau trop sombre. Mais il faut en prendre la mesure.
La souveraineté est le droit absolu d’exercer une autorité législative, judiciaire et administrative sur un pays ou un peuple. L’entrée dans le cyberespace a aboli les frontières et les barrières en tous genres. Internet, le big data, les interconnexions, et les algorithmes complètent la libre circulation des marchandises par celle de la connaissance et multiplient nos capacités d’analyse et de compréhension. Il est donc possible de contrôler les échanges en permanence, pour détecter les failles et les dérives, et de gérer les flux à travers des logiciels de plus en plus performants.
La France est à la croisée des chemins. Après avoir longtemps affirmé sa souveraineté, elle s’est jetée à corps perdu dans la mondialisation. Il est aujourd’hui clair que le fonctionnement n’est pas idéal et que cela favorise la montée des extrêmes.
Il faut trouver une autre voie plus réaliste mais aussi plus ambitieuse. Cela suppose de réfléchir à l’évolution du monde, de se doter d’une politique volontariste pour exploiter les opportunités et s’y tenir. Le destin de la France dépend désormais de sa capacité numérique.
A l’ère de l'Internet des objets connectés, de l’Intelligence artificielle et de la blockchain, la vision naïve d'un numérique libertaire est devenue dangereuse.
Il est grand temps que la France se dote d'un véritable et ambitieuse politique de souveraineté numérique. Notre avenir repose sur le réalisme et non sur un dogmatisme idéologique périmé.
Quelle stratégie industrielle mettre en place pour une cyber sécurité souveraine ?
Quel enseignement supérieur et quelles formations au service d'une cyber sécurité souveraine ? et de nombreuses autres questions seront abordées le 27 juin 2017 par des intervenants prestigieux tels que Louis Pouzin, père de l’Internet et Olivier Itéanu avocat à la cour d’appel de Paris et auteur du livre « Quand le digital défie l’Etat de droit ».
 La souveraineté numérique est l’un des sujets stratégiques essentiels de ce début du XXIème siècle.

Pour l’aborder, il est indispensable de conduire une réflexion sur les fondements de notre économie, de notre culture et de notre système politique face au paradigme de l’économie dite « numérique » ou « digitale ».  Cette économie est en fait une économie informatique anthropologique.
Il faut à mon avis rapprocher les sciences de l’ingénieur des sciences politiques.
C’est la raison pour laquelle j’ai souhaité organiser une Journée sur la Souveraineté numérique.
J’ai voulu cette manifestation. Sciences Po avec l’appui de Forum Atena l’a permise.
Diplômé de cette école, j’ai reçu le meilleur accueil. Jean-Noel Poli Directeur des Achats des Services Généraux et de l’Immobilier a mis un amphithéâtre à notre disposition. Il nous a présenté le projet SciencesPo Campus numérique 2022.
Benoit Thieulin Co-Doyen de l’Ecole du management et de l’innovation de Sciences-Po, ancien Président du Conseil national du numérique a conclu le colloque.
Frédéric Mion, Directeur de Sciences Po, Jérôme Guilbert Directeur de la communication, Olivier Duhamel, Président de la Fondation des Sciences politiques, Pascal Perrineau, Président de l’association des anciens élèves ont été informés de l’événement et l’ont encouragé.
Bruno Gautier et moi-même avons assuré l’organisation. Hubert Chartin et Richard Toper, dirigeants de Wawetel et de Setics, ont sponsorisé le cocktail.
Quelles doivent être les implications des décideurs politiques et économiques face à la souveraineté numérique ? Quelles mesures prendre pour protéger les données des citoyens et des entreprises ? Comment réussir une cyber sécurité souveraine ? Quels enseignements supérieurs et quelles formations spécialisés et généralistes au service de ces ambitions ?
Nous avons choisi vingt cinq intervenants d’horizons variés. Quatre Key notes, deux tables rondes, un atelier collaboratif, trois pitchs, une conclusion (voir annexe).
La souveraineté de l’homme, la souveraineté de l’entreprise, la souveraineté de l’Etat sont mises à l’épreuve par les possibilités du numérique.
Comment le citoyen, peut-il rester souverain de sa propre vie quand à partir des données qu’il laisse sur internet, il est tracé, surveillé, influencé, positivement certes mais aussi négativement ?
Comment l’entreprise peut-elle être souveraine dans sa stratégie quand elle ne peut pour survivre se passer d’un système d’information et que par définition ce système d’information est vulnérable ?
Quel sens peut encore avoir la souveraineté de l’Etat ? Rappelons que la souveraineté est le droit d'exercer une autorité législative, judiciaire et administrative sur une nation ou un peuple. La Monarchie de droit divin, puis la République ont légitimé cette souveraineté.
Internet, le Big data, les interconnexions, et les algorithmes complètent la libre circulation des personnes et des biens par les échanges virtuels au sein de la société de l’information et de la connaissance.
Le monde contemporain entre dans le règne de la donnée à l’ère de la multitude.
A l'ère de l'internet, des objets connectés, de l'intelligence artificielle et de la blockchain, il est grand temps que la France se dote d'une véritable et ambitieuse politique de souveraineté numérique. Aujourd’hui le destin d’un pays dépend de sa capacité numérique.
On ne doit pas limiter le sujet à la mise en valeur de ses start-up.
Certes une dynamique entrepreneuriale forte liée à des acteurs privés est positive.
De nombreux jeunes diplômés français souhaitent créer une start-up. Pour eux, c’est le graal. Dans ma génération, il était conseillé de démarrer sa carrière dans un grand cabinet d'audit.
Je suis un ancien de PriceWaterhouseCoopers. Bien. Il faut encourager l’attitude de ces jeunes parce que ce sont eux qui créent la France de demain. Il faut saluer aussi la création du label « French Tech ».
Mais ce n’est pas suffisant. La première ambition du pays doit être de construire une véritable souveraineté numérique.
Il faut donc bâtir les Institutions permettant l’épanouissement et l’équilibre social du paradigme de cette économie du règne de la donnée à l’ère de la multitude, de l’homme augmenté et de l’entreprise étendue, de l’innovation continue et du développement des territoires. Permettre l’élaboration démocratique et la mise en place de ces Institutions est le rôle des politiques.
Les enjeux de souveraineté numérique sont capitaux. Le risque pour la France et l’Europe de devenir des « colonies numériques » des continents américains et asiatiques est réel.
Face à cette question essentielle et stratégique, parmi les 577 députés et les 348 sénateurs, lors de la dernière législature, une vingtaine s’y intéressaient ; et aucun n’avance de solutions réelles pour faire pièce aux géants technologiques américains et asiatiques. Pourtant face aux technologies numériques, dont le potentiel de transformation n’est qu’au tout début, les opportunités sont vastes et les menaces énormes.
Depuis une vingtaine d'années les services développés sur Internet et grâce à Internet changent notre quotidien.
Accès à la gigantesque base de connaissances qu'est Internet grâce à Google, connexion des individus dans le monde entier grâce à Facebook et LinkedIn, accès en ligne dans le domaine culturel des images et des musiques grâce à Youtube, mise en valeur des offres d'hébergement grâce à Brookings et Airbnb, développement du e-commerce grâce à Amazon.
Tous ces géants de l'Internet que nous utilisons sont majoritairement  américains.
Chacun d'entre eux connait beaucoup de nous-mêmes grâce aux données qu'il collecte en permanence sur nos comportements et aux algorithmes, qui les raffinent.
Une deuxième phase arrive. C’est celle de l'intelligence artificielle, des robots intelligents et des objets connectés. Si l’histoire de l'Internet se poursuit sous le même modèle que celui de ces dernières années, nous mettrons purement et simplement notre vie personnelle et collective ainsi que celle des états entre les mains des Américains puis après une reconfiguration aussi entre les mains des Chinois.
Est-ce une provocation que de dire : finalement pas besoin de protection particulière car nous donnons déjà tout volontairement ? Pourquoi chercher à faire de la cyber sécurité ?
Volontairement pour pouvoir utiliser ces services nous donnons accès à nos données.
En plus nous ignorons sur quels territoires sont hébergées nos données via des datacenters.
La souveraineté numérique passe donc par une maîtrise industrielle, par la production des données à l'échelle européenne. Il me semble difficile d’agir sur ce sujet à 27.
Il faut revisiter l'ambition européenne. On peut imaginer la construction en bilatéral avec l'Allemagne d'un espace numérique homogène. Cet espace prévoirait une réglementation identique entre les deux pays, avec une vision éthique de la vie privée et de l'usage de l’utilisation des données et des algorithmes de l'intelligence artificielle. Cet espace serait le lieu de la réflexion de la place de l'homme dans le monde numérique.
Notre pays doit avoir aussi une ambition industrielle numérique. Dans ce cadre il faut renforcer l'industrie de la cyber sécurité et de la cyber défense.
Ces propos ne concernent pas uniquement des intérêts économiques mais aussi des choix de société.
Face à la prise de décision par des algorithmes d'intelligence artificielle, nous devons définir quelle sera la place de la décision humaine, quelles seront les règles communes de vie dans notre société, quelle sera la place de la vie privée et de la solidarité.
Les réponses à ces questions n'ont pas à être données par les américains ou les asiatiques à notre place.
Ce serait délaisser la vision de notre société à d'autres. Ce serait un abandon complet de notre culture, de notre indépendance, de nos libertés et de notre avenir.

Programme de la Journée Souveraineté Numérique à Sciences Po le 27 juin 2017
Key note 1 : Le regard de Louis Pouzin, père de l’internet. Fondateur d’Open-Root, libérateur de noms de domaine. Quels sont nos moyens de souveraineté numérique ?
En matière numérique les Etats européens sont devenus des colonies. Pourtant une kyrielle de moyens sont utilisables pour éroder la dominance étasunienne.
Key note 2 : Pascal Picq, paléoanthropologue, maître de conférences au Collège de France.
Key note 3 : Jacques Cheminade, Homme politique et Essayiste.
Le numérique au service du financier ou de l’humanité ?
Key note 4 : Grichka Bogdanoff  Ecrivain scientifique : Les ordinateurs quantiques vers une révolution numérique.
Table ronde 1 : La souveraineté numérique comment la piloter ? Quelles gouvernances ?
animée par Geneviève Bouché, Futurologue. Rapporteur : François Charles Président de l’Institut de Recherche et de Communication sur l’Europe.
• Michel Maffesoli, Professeur Emérite à la Sorbonne. Sociologue. Administrateur du CNRS. Auteur du livre « La postmodernité à l’heure du numérique. Regards croisés sur une époque ».
• Patrice Noailles-Siméon, Directeur des études du eFPI Forum Européen des Politiques d'Innovation et secrétaire Général du Collectif Innovation
Pour une co-Gouvernance de la Souveraineté Numérique
• Manuel Géa, Président fondateur de Centrale Santé, CEO Bio-Modeling Systems
• Christian de Boissieu, Professeur à l'Université de Paris (Panthéon Sorbonne) et au Collège d'Europe (Bruges), Membre du Collège de l'AMF
• Muriel Touaty, Directrice Générale Technion France Israel Institute of Technology.       Comment l’esprit d’innovation, le monde de la recherche et les technologies de pointe peuvent aider un pays à permettre sa souveraineté numérique.
Table ronde 2 : La souveraineté numérique : levier majeur de notre compétitivité ? Subir ou agir ? Analyse prospective autour de thématiques économique, sociale et juridique.
animée par Dominique Chauvin, Prospectiviste. Rapporteur : Henri Peyret Principal Analyst Forrester Research. Responsable de la communauté des architectes d’entreprises pour Forrester.
• Olivier Iteanu, Avocat à la cour d’appel de Paris. Auteur du livre « Quand le digital défie l’état de droit ».
La constitution de l’internet est elle la constitution américaine ?
• Francis Jutand, Directeur Général adjoint de l’Institut Mines Télécom
• Alain Bouillé Directeur Sécurité des Systèmes d’information Groupe Caisse des Dépôts
• Fabrice Epelboin Enseignant à SciencesPo et CMO & Cofonder de Yogosha Plateforme de cybersécurité collaborative.
• Michel Canevet Sénateur-Maire de Planéour Lanvern
- Atelier collaboratif : Outils et méthodes : Quelles alternatives ? Construisons notre souveraineté. Eric Leandri, Président fondateur de Qwant moteur de recherche français
- Trois pitchs :
Fabrice Epelboin CMO & Cofonder : Yogosha Plateforme de cybersécurité collaborative
Stephane Cachelin Inventeur Mobilier urbain Objets connectés « Le Chapotelet » Médaille d’or du Concours Lepine
Jacques H Paget, avocat, expert en négociations, illusionniste  Le pouvoir de l’illusion, la force de fascination.
Clôture : Benoit Thieulin Co-Doyen de l’Ecole du management et de l’innovation de Sciences-Po, ancien Président du Conseil national du numérique.

  Une poignée de géants numériques sont lancés dans la course folle des 1.000 milliards de dollars de capitalisation boursière. Il faut s'interroger sur les ressorts qui créent de telles rentes.
Ce sont les nouveaux monstres engendrés par Wall Street. Une poignée de géants bien connus sous le nom de GAFAM - Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft - sont lancés dans une course folle : être le premier à atteindre la barre des 1.000 milliards de dollars de capitalisation boursière. Ils n'en sont plus très loin. Et cette compétition est très représentative au fond de ce qu'est devenue notre économie.
Au siècle dernier, les industriels de la deuxième révolution industrielle de 1880 ont longtemps dominé la bourse : General Motors dans les années 1920, du Pont de Nemours et Standard Oil  dans les années 1950, Genéral Electric dans les années 1980.
Leur règne n'a été interrompu qu'au cours des grandes percées technologiques : les télécoms avec AT$T dans les années 1920, l'informatique avec IBM dans les années 1960 ou Microsoft dans les années 1990.
Aujourd'hui tous les élans sont numériques. Les GAFAM  sont évidemment les fruits de la révolution digitale.
Mais ils sont aussi le produit de la mondialisation triomphante qui a permis à Apple d’écouler 300 millions d'iPhone en Chine ; le produit de la plateformisation qui donne à Google et sa filiale Youtube 4 milliards de vidéos regardées chaque jour ; le produit du phénomène du « Winner takes it all » qui donne un avantage considérable au premier entrant : Facebook a mis quatre ans à conquérir 50 millions d'utilisateurs (il en revendique désormais 2 milliards) quand l’automobile avait mis 62 ans, la télévision 22 ans et les ordinateurs 14 ans.
On pourrait ainsi multiplier les chiffres spectaculaires. Il donne une idée de la formidable accélération des deux dernières décennies, période durant laquelle je me suis engagé dans l’intelligence économique en France et  j’ai poursuivi mes recherches et mes réalisations en stratégie d’entreprise.
Ces faits et ces chiffres doivent nous amener à nous poser un certain nombre de questions.
- On ne peut d'abord que faire le constat que ces mastodontes sont tous d’origine américaine.
Leurs concurrents chinois ne sont pas loin derrière. Aucune trace en revanche d'un grand acteur européen. Les GAFAM sont nés aux États-Unis, ont grandi dans la Silicon Valley et impose désormais leur hégémonie numérique partout dans le monde.
L'Europe est dramatiquement absente de cette guerre technologique.
- Il faut ensuite s’interroger sur les ressorts qui permettent de créer de telles rentes.
Car ces géants ne sont pas seulement en train de dominer la planète boursière.
Ils colonisent aussi nos vies privées et maîtrisent la diffusion de l'information.
Ils sont devenus maîtres en matière d'optimisation fiscale.
Ils captent les innovations grâce à leur puissance financière.
Ils sont en train de dessiner notre futur en investissant dans l'intelligence artificielle ou la bioéthique.
Ils sont au fond devenu les nouveaux souverains, en passe de concurrencer les Etats.
Et le jour viendra où ils créeront leur propre monnaie pour affirmer encore leur autorité.
Qui pourra alors les contrôler ?





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