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mardi 31 juillet 2018

France : "Une certaine méconnaissance de l'économie"

L'état des lieux
1- Les Français ignorent  les fondamentaux de l’économie
2- L’élite même a longtemps ignoré le nouveau paradigme économique de la troisième révolution industrielle de 1980. Quelle économie sommes nous en train de quitter ? Dans quelle économie entrons-nous ?  Les dirigeants n’ont pas su répondre à cette question.
3- Face aux métamorphoses du monde, les économistes semblent impuissants.Ils doivent changer radicalement leurs représentations théoriques, anciennes et inefficaces.

1- Les Français ignorent  les fondamentaux de l’économie
« La méconnaissance en économie est une menace pour la démocratie » disait Michel Rocard en 2012.
Les populismes progressent en Europe, aux Etats-Unis. Un même mal ronge les démocraties les mieux installées.
De jeunes dirigeants incultes face aux leçons de l’histoire des extrémismes, ignorant des principes fondamentaux des sciences économiques, renouent avec un langage d’exclusion et font croire que les tensions des temps présents seront résolues en favorisant le nationalisme et en désignant des boucs émissaires.
L'inculture économique des Français provoque une faille démocratique.

L'ignorance des Français en économie ouvre la voie aux discours les plus fantaisistes.

Cela nuit à la sérénité des débats en particulier en ce qui concerne notre politique économique et notre politique étrangère.

Les Français sont t’ils tous égaux face aux choix économiques qui engagent leur avenir ? Dans quelle mesure sont t’ils capables de s’approprier les informations disponibles et de comprendre les implications de leurs choix ?
Une étude réalisée par Opinionway en mars 2018  pour Le Cercle Jean Baptiste Say, indiquait que certains Français s'intéressaient à l'économie, mais regrettaient de n'avoir pas les connaissances nécessaires pour comprendre les mécanismes et les enjeux.
Pourtant cela ne les empêchent pas d’avoir des à priori en fait non fondés.
Ainsi, l'étude démontrait que nos concitoyens surestiment la croissance des écarts de revenu en France au cours des dix dernières années et sont très nombreux à sous-estimer la part de l'impôt sur le revenu payé par les plus riches.

 

Il faut aller plus loin afin de mieux comprendre le rapport des Français avec l'économie et mesurer les conséquences que cette ignorance, ces lacunes, ces idées reçues peuvent avoir sur les choix démocratiques.

Il apparaît en premier lieu que 57 % des Français (Sondage Viavoice, mai 2018) ne savent pas, même de manière approximative, quelle est la proportion réelle de ménages en France qui paye l'impôt sur le revenu - impôt pourtant hautement symbolique, qui donne régulièrement lieu à des débats enflammés. Dans un pays où le consentement à l'impôt ne cesse de se détériorer, une telle donnée ne peut qu'inquiéter, car cette méconnaissance ouvre la voie à tous les fantasmes et rend nos concitoyens vulnérables à toutes  les « fake news ».

Dans un registre plus international, il apparaît que plus de la moitié des Français juge que la Chine et  le Qatar sont les deux investisseurs principaux en France.
En réalité, en 2017, nos deux plus gros investisseurs étrangers étaient l'Allemagne et les Etats-Unis.
Or les bonnes réponses au sujet de ces deux pays ne recueillent que 25 et 21 % de bonnes réponses respectivement. Nous mesurons là l'ampleur des craintes, face à des puissances montantes qui donnent l’image d'acheteurs de notre pays à la découpe.
Ces idées fausses et  reçues ouvrent grand la voie aux discours les plus fantaisistes et nuisent à la sérénité des débats sur notre politique économique et étrangère.

39 % de nos concitoyens admettent connaître et comprendre faiblement' l'économie.
Les Français sont d'ailleurs nombreux à avoir le sentiment de ne pas avoir les connaissances nécessaires dans le domaine économique.
55 % jugent avoir un niveau de compréhension et de connaissance « moyen », et 28 % « faible », s'agissant des questions économiques traitées dans l'actualité.
46 % estiment leur connaissance et leur compréhension de l'économie dans le monde de l'entreprise « moyenne », et 38 % « faible ».
46 % connaissent et comprennent moyennement l'économie dans le cadre des programmes politiques, et 39 % « faiblement ». Sans compter ceux qui croient savoir.
On mesure ici l'ampleur de la frustration qui doit être celle des téléspectateurs confrontés aux multitudes de chiffres et statistiques assénés par les candidats lors des traditionnels débats.
On comprend mieux, par ailleurs, comment des candidats auxquels les experts ne prêtent par ailleurs aucunes compétences économiques, tels que Marine Le Pen, peuvent parvenir au second tour d'une élection présidentielle...

Le sentiment que les Français ne sont pas bien armés intellectuellement dans le domaine économique pour faire les choix politiques qui s'imposent est donc évident et réel. Il semble que les Français l’admettent. Cela est positif. Ils pourraient ne pas avoir massivement conscience de leur ignorance.  
Pourtant le programme économique d'un candidat s'impose comme le premier critère de choix électoral des Français interrogés (55 % de réponses), devant le programme social (49 %), et la philosophie globale de son programme (45 %).
La personnalité (32 %), le parti auquel il appartient (29 %) ou le programme écologique (24 %) n'arrivent que bien après dans les critères pris en considération au moment du choix de vote.
Comment les Français pallient-ils leurs déficits de connaissance économique ? Comment jugent-ils de la crédibilité relative des théories économiques ?
Interrogés de manière ouverte sur ce sujet, ils répondent en premier lieu à partir des exemples concrets, en ramenant les thèses à ce qu'ils peuvent constater chaque jour dans leur vie quotidienne. Ce qui n’est évidemment pas un raisonnement pertinent.
Un des leurres de la démocratie consiste à croire qu’au sein d’un peuple les citoyens sont tous à même d'émettre un jugement rationnel et pertinent. Or il apparaît que l’ignorance l'économie est une faille majeure dans le débat démocratique.
Nous sommes en effet loin d'être tous simultanément des experts en géopolitique, droit, économie, sociologie,... et pourtant, nous votons. Face à ce constat, certains pourraient plaider pour des solutions antidémocratiques : changer de système, passer à une République des experts, revenir à une monarchie éclairée ou une dictature plus ou moins douce.
Il me semble qu’une autre réponse à cette faille démocratique est plus pertinente, juste et positive. Elle consiste à développer la pédagogie, et notamment l'enseignement de connaissances économiques de base et ce tout au long de la vie.
Considérer, en somme, que les connaissances économiques font partie intégrante d'un socle de citoyenneté, un ensemble de connaissances indispensables afin d'être un citoyen vraiment acteur de son destin car éclairé dans ses choix.
L'économie en politique ne doit plus être réduite à la simple idée de ce que l'on croit en connaître. Elle doit redevenir un choix éclairé, sur la base des réalités, des contraintes, des possibilités, des enjeux, des innovations.

L’inculture économique des Français est accompagnée d’une incompréhension des mécanismes financiers.
Le constat des lacunes est hélas confirmé sondage après sondage : les Français n’ont pas une culture financière suffisante pour bien se débrouiller avec les concepts liés à l’argent leur permettant de prendre des bonnes décisions.
Seulement la moitié d’entre eux est capable par exemple de dire combien rapportent 100 euros placés à 2 % au bout d’une année !
De même, s’ils sont de gros épargnants, c’est sans doute parce qu’ils sont frileux car ils n’aiment pas le risque, et du coup l’allocation de leur épargne n’est pas optimale.
Pourtant, pour préparer la retraite ou financer les études des enfants, il va falloir de  plus en plus que les familles anticipent et apprennent se poser les bonnes questions au bon moment.

La France souffre donc d’un problème d'inculture économique. Le problème n’est pas nouveau mais il est toujours existant.
On l'a constaté par exemple durant la campagne présidentielle de 2017.
J’ai eu le sentiment que nos concitoyens étaient perméables à des raisonnements économiques outrancièrement erronés, sans esprit critique.
Force est de constater qu’l y a un manque d'éducation économique de notre population.
Cette inculture concerne jusqu'aux écrivains et autres personnalités de l'intelligentsia qui interviennent régulièrement à la télévision : dès qu'ils parlent d'économie, le propos devient moins pertinent.
Il est donc nécessaire de former nos concitoyens afin qu’ils deviennent des « citoyens du monde » qui comprennent les mécanismes économiques de base.
Il faut aborder des questions concrètes et simples telles que :
Quelles seraient les conséquences économiques d'une sortie de l'euro ?
Quels sont les effets directs et indirects d'une relance budgétaire ?
Les mécanismes de base doivent être assimilés, comme dans les autres disciplines enseignées. Ensuite, on peut critiquer le système ; pas avant, pas sans compréhension, pas sans connaissance, pas sans raisonnement, pas sans fondamentaux, pas n’importe comment  et
Il faut absolument qu'un socle de base soit maîtrisé. Or, malheureusement, souvent, ce n'est pas le cas.
Il faut procéder à une évaluation rigoureuse des programmes d’enseignement de l’économie dans notre pays et les réformer.  
Il ne s’agit pas, à mon avis, de déchirer les programmes existants. On peut s’appuyer sur les acquis et sur les réflexions menées précédemment. En particulier, le rapport Guesnerie, rapport de 2008 remis à l'ex-ministre Xavier Darcos qui contenait déjà d'excellentes idées Donc nous disposons déjà d’une base. Mais il me parait opportun d'améliorer les programmes en s'inspirant des bonnes pratiques internationales. Répétons le l’élève doit acquérir des bases solides. Cela n’est pas incompatible avec le souci permanent de motiver et d'intéresser les élèves. Chaque sujet étudié devra être imprégné du dialogue entre l'empirique et la théorie mais seulement après que les fondamentaux aient été acquis. On peut imaginer un aspect pratique, voire ludique dans l'enseignement de l'économie avec la mise en situation à partir de cas pratiques ou de jeux de rôles notamment lorsque l'on étudie les interactions stratégiques.
On est en droit de se poser la question de savoir si il possible de former les lycéens valablement si l’on consacre seulement 1 h 30 par semaine aux sciences économiques et sociales en classe de seconde.
Il me semble évident que ce que l'on peut réaliser avec une aussi courte durée par semaine est relativement limité. Mais déjà on peut sensibiliser les élèves aux grandes questions et aux tendances historiques de l'économie. On peut aussi les introduire à certaines notions dont on parle dans les médias : taux d'intérêt, taux de change, taux de chômage, mesures d'inégalités, déficits et dette, etc.
Comment s’y prendre ? On peut certes entrer en contact avec les associations de professeurs de sciences économiques et sociales. Mais il faut aussi que des acteurs de l’entreprise ou des consultants de différentes disciplines soient représentés.
Pour construire le modèle d’enseignement du sujet, il faut prévoir un groupe diversifié apportant des éclairages et des expériences très complémentaires.
On peut espérer que ce groupe élabore un processus constructif à partir de débats sans tabou et sans a priori, prévoyant un matériel pédagogique adapté, ayant le souci commun de former des citoyens capables de raisonner par eux-mêmes et de comprendre le monde dans lequel ils évoluent.
Est-ce que le lycée apprend l’économie aux Français ou leur  apprend à se méfier de l’économie ? La question est iconoclaste  mais elle mérite d’être posée. Car de nombreux  Français ne comprennent rien aux réformes et les « politisent » de façon caricaturale.
L’objectif est de mieux préparer les élèves à poursuivre des études supérieures, lesquelles doivent être aussi entièrement revisitées quant aux programmes et méthodes d’enseignement.

2- Ou sont parmi nos élites des années 2000 les penseurs des transformations, les éclaireurs de l’avenir, les pédagogues du changement face à la troisième révolution industrielle de 1980 ?

Le monde est entré depuis les années 1980 dans la troisième révolution industrielle avec comme intrant la donnée et plus précisément les processus normés et informatisés. Les intrants des deux premières révolutions industrielles de 1780 et 1880 étaient la vapeur, l’électricité puis le pétrole.
Cette troisième révolution industrielle, la France l’a ratée.
En fait l'erreur capitale et fondamentale, aussi dramatique que celle du haut commandement français dans les années 1930 en termes de stratégie militaire, a été de penser que, alors qu'effectivement nous sortions de la deuxième révolution industrielle, nous devions sortir du monde industriel.
Les élites françaises ont pensé que l’on pouvait abandonner le monde industriel au profit du monde des services.
Elles n'ont pas compris qu'on entrait dans une troisième révolution industrielle, qu’on entrait dans l'économie de l'immatériel, de la dématérialisation.
En fait, le système, qui se dessinait était un système hyper industriel basé sur la robotisation et doté de systèmes de production hyper capitalistiques.

La France a fonctionné en sens inverse.
Nous avons cru aux chimères d'une société postindustrielle et d'un territoire sans usine.
Nous avons misé sur une économie de services délaissant aux pays émergeants mais aussi à l'Allemagne et au Japon le soin de produire les équipements et les biens de consommation, dont nous avons besoin.
Nous avons sacrifié la compétitivité sur un modèle de croissance tiré par la consommation sans se préoccuper des équilibres extérieurs.
C'est peu dire que la stratégie de la France n’a pas été la bonne.
Il y a eu un contresens stratégique quasi total sur l’analyse du monde.


Ou sont parmi nos élites les penseurs des transformations en cours, les éclaireurs de l’avenir, les pédagogues du changement ?
Face à ces retards, ces blocages et ces défis la société civile a un rôle à jouer. L'heure est au changement de logiciel dans la sphère politique.
Nos institutions, inspirées par le Conseil National de la Résistance, ont été rédigées pour servir le précédent modèle économique : l’économie fordiste de la deuxième moitié de la deuxième révolution industrielle : économie de masse : masse de travailleurs de la grande entreprise pyramidale, normalisée, hiérarchisée, optimisée, cadencée par l’organisation scientifique du travail, fabricant des produits standardisés, faisant l’objet d’une consommation de masse sur des marchés grand public.
Il faut bâtir les Institutions permettant l’épanouissement et l’équilibre social du paradigme de l’économie numérique du règne de la donnée à l’ère de la multitude, de l’homme augmenté et de l’entreprise étendue, de l’innovation continue et du développement des territoires.

Nous assistons au passage de l'ère de la main d'œuvre du XXème à l'ère du "cerveau d'œuvre" du XXIème siècle.

De ce fait nous entrons dans la vague d'innovation ou destruction créatrice la plus forte de l'histoire de l'humanité.
Ce qu'on nome " numérique" n'est pas seulement une technologie et encore moins un secteur parmi d'autres. Cette informatique optimisée bouleverse la manière de produire et de consommer. Elle permet un rapprochement inédit de l'offre et de la demande. Elle transforme l'intermédiation.
L''homo numericus ne "va «plus seulement sur internet. Il se trouve à l'intérieur de l'écosystème internet. L'action, l'attitude, la place de l'homme siècle sont différentes dans l'économie numérique du XXIème et dans l'économie fordiste du XXème siècle.
L’homme est plonge dans un paradigme nouveau. Ce paradigme impose à l'ensemble de l'économie un changement de fonctionnements, usages et de méthodes. Elles sont directement liées à la mise en réseau des individus.
À terme, toute l'économie sera informatique et dominée  par des entreprises numériques, qui capteront l'essentiel de la création de valeur ajoutée dans des chaînes de valeur recomposées.
 

Il est indispensable de  mieux nous préparer à la société du « tout numérique »

La radicalité des changements technologiques nous impose de revoir nos systèmes d'éducation. Il nous faut anticiper l'automatisation du travail afin de ne pas fracturer davantage nos sociétés.

Notre époque est celle de grands bouleversements. L'équilibre du pouvoir mondial bascule, le contrat social propre à la démocratie et aux économies libérales est sous pression, nous sommes face à une révolution numérique qui change nos modes de vie et de travail.
Selon McKinsey,  près de la moitié du travail humain pourrait être automatisé. De nombreux emplois ne seront que partiellement automatisés, l'homme cohabitant avec les machines. D'autres professions seront entièrement supplantées.
Entre 2016 et 2030, environ 400 millions de travailleurs - 15 % de la main-d'oeuvre mondiale - pourraient être concernés, pas uniquement ceux dont les tâches sont routinières et répétitives, mais aussi les professions libérales et les métiers manuels.
Les avancées technologiques ont un énorme potentiel.
Le vieillissement de la population et la baisse des taux de natalité pèsent sur la croissance mais en compensation la technologie peut stimuler la productivité et la prospérité mondiale. L'apprentissage automatique et l'intelligence artificielle améliorent  notre potentiel à exploiter les données pour résoudre les problèmes les plus urgents et les plus ardus, comme les maladies infectieuses et le changement climatique.

Nous assistons à une révolution des compétences

Il est inévitable que les compétences nécessaires sur le marché du travail changeront considérablement dans les années à venir. Il faut préparer les étudiants à ce nouvel environnement.

3- Face aux métamorphoses du monde, les économistes se montrent impuissants.

Il semble qu’ils doivent changer radicalement leurs représentations théoriques, anciennes, inefficaces.

Au sortir de la Grande Dépression des années 1930, la science économique avait inventé  Keynes et complètement transformé l'action publique en ce qui concerne la fiscalité et la monnaie avec Roosevelt.
Après la crise de 2008, d'une ampleur équivalente, quels ont été les changements du même ordre ? Quelle métamorphose intellectuelle, institutionnelle et politique a eu lien?
En fait. Rien. Les banques ont été sauvées,. Mais tous les problèmes restent pendants.

- Le commerce. Donald Trump fait du libre-échange la cause des malheurs du peuple américain. Tous les pays excédentaires sont alignés, Chine, Japon, Allemagne.
Les économistes déplorent et prédisent le pire. Ils ont raison sans doute mais pourquoi  ne nous ont-ils pas prévenus que  la mondialisation allait faire tant de  perdants.
Lesquels perdants alimentant les votes populistes.
Que faut-il faire ? De l'éducation répondent-ils. Elever le niveau général.
Mais la Chine, l'Inde et le monde procède de la même manière. Alors où sera notre avantage comparatif ? Et que faire des gens qui n'ont pas le niveau et ne sont pas capables  de l'avoir ?
Les populistes prennent le pouvoir à grande vitesse parce que les économistes n'ont pas trouvé comment réformer le commerce international pour faire moins de dégâts. Les échanges touchent maintenant les normes et les standards par exemple alimentaires, autrement dit les styles de vie.
Or les populations des démocraties occidentales veulent préserver leur style de vie. Comment faire ? Les économistes n’ont pas de réponse.

- L'immigration. Les économistes nous disent que la grande question du futur sera la mobilité. Tout change vite, il faut s'adapter en permanence.
Mais la migration, n'est-ce pas la mobilité par excellence ?
L’homme se rend là où il y a des subsistances Il procède de même depuis la nuit des temps. Au nom de quoi l'interdire soudainement ? Au nom des Etats, disent les populistes.
Les économistes savent que l'Etat, forme institutionnelle héritée du XIXe siècle est moins efficace face aux défis d'aujourd'hui : climat, finance, neurosciences. Et ce du fait d’une perte de souveraineté et d’un endettement.
Alors quelle est la solution économique pour éviter que les « perdants » n'en arrivent à voter pour ceux qui promettent de construire des murs pour se protéger ? Les économistes n’ont pas de réponse.
- La technologie. La plus faible des réponses des économistes aux métamorphoses concerne la technologie. Celle-ci bouleverse tout pourtant les statistiques de productivité ne le constatent pas. Le paradoxe divise la profession qui a trouvé comment le qualifier, « la stagnation séculaire », mais qui ignore tout des voies pour nous en sortir.
- L’intelligence artificielle. Le vide de réponses concerne aussi ce formidable défi. 
N'ayez crainte disent les économistes, il y aura toujours des emplois.  Tant mieux. Mais lesquels ?
Les emplois très qualifiés et ceux tout bas de gamme.
Et les autres emplois ? Réponse imprécise pour la classe moyenne. Or cette dernière concerne la majorité des gens et leur peur du déclassement les amène à voter populiste.
Les inégalités sont-elles, en conséquence, vouées à toujours grandir et à creuser l'écart entre une élite et le peuple ?

Le fond de l'affaire, il me semble, est que les économistes vivent sur un modèle de référence, l'équilibre général dynamique stochastique, DSGE en anglais, hérité de lord Keynes.
Il est enseigné aux étudiants de la discipline. Certes, il a été modifié dans les années 1970 pour répondre à l'inflation et élargi.
Il faut admettre qu'il ne fait pas commettre que des erreurs.
Le sauvetage des banques par la politique monétaire en 2008 a permis d'éviter les horreurs des années 1930. La crise financière a été arrêtée.
Mais il est supposé donner la réponse à tous les niveaux, ménages, entreprises, Etats, à partir de la rationalité des choix : les gens suivent toujours leur intérêt.
Or, la réalité « comportementale » est bien plus complexe.
Aujourd'hui le modèle « fonctionne mal », reconnaît Olivier Blanchard, ancien chef économiste du FMI, qui est aux avant-postes des essais de reformulation théorique de la science économique (1). La recherche se fait maintenant vers l'explosion en plusieurs modèles suivant les objectifs.
Mais les économistes sont très loin de disposer d'un nouveau corpus théorique en état de marche.
La question du risque, pour la finance comme pour un ménage, reste mystérieuse. La contagion est nulle puis soudaine, non linéaire donc, c'est-à-dire difficilement modélisable.
La méthodologie change avec les data, les données, pour vérifier les hypothèses micro, mais le retour à la théorie reste à faire parce que le métier d'économiste doit s'ouvrir aux autres disciplines psychologie par exemple.
Bref, tout est encore très incertain.

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