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mardi 31 juillet 2018

France : "Une certaine méconnaissance de l'économie"

L'état des lieux
1- Les Français ignorent  les fondamentaux de l’économie
2- L’élite même a longtemps ignoré le nouveau paradigme économique de la troisième révolution industrielle de 1980. Quelle économie sommes nous en train de quitter ? Dans quelle économie entrons-nous ?  Les dirigeants n’ont pas su répondre à cette question.
3- Face aux métamorphoses du monde, les économistes semblent impuissants.Ils doivent changer radicalement leurs représentations théoriques, anciennes et inefficaces.

1- Les Français ignorent  les fondamentaux de l’économie
« La méconnaissance en économie est une menace pour la démocratie » disait Michel Rocard en 2012.
Les populismes progressent en Europe, aux Etats-Unis. Un même mal ronge les démocraties les mieux installées.
De jeunes dirigeants incultes face aux leçons de l’histoire des extrémismes, ignorant des principes fondamentaux des sciences économiques, renouent avec un langage d’exclusion et font croire que les tensions des temps présents seront résolues en favorisant le nationalisme et en désignant des boucs émissaires.
L'inculture économique des Français provoque une faille démocratique.

L'ignorance des Français en économie ouvre la voie aux discours les plus fantaisistes.

Cela nuit à la sérénité des débats en particulier en ce qui concerne notre politique économique et notre politique étrangère.

Les Français sont t’ils tous égaux face aux choix économiques qui engagent leur avenir ? Dans quelle mesure sont t’ils capables de s’approprier les informations disponibles et de comprendre les implications de leurs choix ?
Une étude réalisée par Opinionway en mars 2018  pour Le Cercle Jean Baptiste Say, indiquait que certains Français s'intéressaient à l'économie, mais regrettaient de n'avoir pas les connaissances nécessaires pour comprendre les mécanismes et les enjeux.
Pourtant cela ne les empêchent pas d’avoir des à priori en fait non fondés.
Ainsi, l'étude démontrait que nos concitoyens surestiment la croissance des écarts de revenu en France au cours des dix dernières années et sont très nombreux à sous-estimer la part de l'impôt sur le revenu payé par les plus riches.

 

Il faut aller plus loin afin de mieux comprendre le rapport des Français avec l'économie et mesurer les conséquences que cette ignorance, ces lacunes, ces idées reçues peuvent avoir sur les choix démocratiques.

Il apparaît en premier lieu que 57 % des Français (Sondage Viavoice, mai 2018) ne savent pas, même de manière approximative, quelle est la proportion réelle de ménages en France qui paye l'impôt sur le revenu - impôt pourtant hautement symbolique, qui donne régulièrement lieu à des débats enflammés. Dans un pays où le consentement à l'impôt ne cesse de se détériorer, une telle donnée ne peut qu'inquiéter, car cette méconnaissance ouvre la voie à tous les fantasmes et rend nos concitoyens vulnérables à toutes  les « fake news ».

Dans un registre plus international, il apparaît que plus de la moitié des Français juge que la Chine et  le Qatar sont les deux investisseurs principaux en France.
En réalité, en 2017, nos deux plus gros investisseurs étrangers étaient l'Allemagne et les Etats-Unis.
Or les bonnes réponses au sujet de ces deux pays ne recueillent que 25 et 21 % de bonnes réponses respectivement. Nous mesurons là l'ampleur des craintes, face à des puissances montantes qui donnent l’image d'acheteurs de notre pays à la découpe.
Ces idées fausses et  reçues ouvrent grand la voie aux discours les plus fantaisistes et nuisent à la sérénité des débats sur notre politique économique et étrangère.

39 % de nos concitoyens admettent connaître et comprendre faiblement' l'économie.
Les Français sont d'ailleurs nombreux à avoir le sentiment de ne pas avoir les connaissances nécessaires dans le domaine économique.
55 % jugent avoir un niveau de compréhension et de connaissance « moyen », et 28 % « faible », s'agissant des questions économiques traitées dans l'actualité.
46 % estiment leur connaissance et leur compréhension de l'économie dans le monde de l'entreprise « moyenne », et 38 % « faible ».
46 % connaissent et comprennent moyennement l'économie dans le cadre des programmes politiques, et 39 % « faiblement ». Sans compter ceux qui croient savoir.
On mesure ici l'ampleur de la frustration qui doit être celle des téléspectateurs confrontés aux multitudes de chiffres et statistiques assénés par les candidats lors des traditionnels débats.
On comprend mieux, par ailleurs, comment des candidats auxquels les experts ne prêtent par ailleurs aucunes compétences économiques, tels que Marine Le Pen, peuvent parvenir au second tour d'une élection présidentielle...

Le sentiment que les Français ne sont pas bien armés intellectuellement dans le domaine économique pour faire les choix politiques qui s'imposent est donc évident et réel. Il semble que les Français l’admettent. Cela est positif. Ils pourraient ne pas avoir massivement conscience de leur ignorance.  
Pourtant le programme économique d'un candidat s'impose comme le premier critère de choix électoral des Français interrogés (55 % de réponses), devant le programme social (49 %), et la philosophie globale de son programme (45 %).
La personnalité (32 %), le parti auquel il appartient (29 %) ou le programme écologique (24 %) n'arrivent que bien après dans les critères pris en considération au moment du choix de vote.
Comment les Français pallient-ils leurs déficits de connaissance économique ? Comment jugent-ils de la crédibilité relative des théories économiques ?
Interrogés de manière ouverte sur ce sujet, ils répondent en premier lieu à partir des exemples concrets, en ramenant les thèses à ce qu'ils peuvent constater chaque jour dans leur vie quotidienne. Ce qui n’est évidemment pas un raisonnement pertinent.
Un des leurres de la démocratie consiste à croire qu’au sein d’un peuple les citoyens sont tous à même d'émettre un jugement rationnel et pertinent. Or il apparaît que l’ignorance l'économie est une faille majeure dans le débat démocratique.
Nous sommes en effet loin d'être tous simultanément des experts en géopolitique, droit, économie, sociologie,... et pourtant, nous votons. Face à ce constat, certains pourraient plaider pour des solutions antidémocratiques : changer de système, passer à une République des experts, revenir à une monarchie éclairée ou une dictature plus ou moins douce.
Il me semble qu’une autre réponse à cette faille démocratique est plus pertinente, juste et positive. Elle consiste à développer la pédagogie, et notamment l'enseignement de connaissances économiques de base et ce tout au long de la vie.
Considérer, en somme, que les connaissances économiques font partie intégrante d'un socle de citoyenneté, un ensemble de connaissances indispensables afin d'être un citoyen vraiment acteur de son destin car éclairé dans ses choix.
L'économie en politique ne doit plus être réduite à la simple idée de ce que l'on croit en connaître. Elle doit redevenir un choix éclairé, sur la base des réalités, des contraintes, des possibilités, des enjeux, des innovations.

L’inculture économique des Français est accompagnée d’une incompréhension des mécanismes financiers.
Le constat des lacunes est hélas confirmé sondage après sondage : les Français n’ont pas une culture financière suffisante pour bien se débrouiller avec les concepts liés à l’argent leur permettant de prendre des bonnes décisions.
Seulement la moitié d’entre eux est capable par exemple de dire combien rapportent 100 euros placés à 2 % au bout d’une année !
De même, s’ils sont de gros épargnants, c’est sans doute parce qu’ils sont frileux car ils n’aiment pas le risque, et du coup l’allocation de leur épargne n’est pas optimale.
Pourtant, pour préparer la retraite ou financer les études des enfants, il va falloir de  plus en plus que les familles anticipent et apprennent se poser les bonnes questions au bon moment.

La France souffre donc d’un problème d'inculture économique. Le problème n’est pas nouveau mais il est toujours existant.
On l'a constaté par exemple durant la campagne présidentielle de 2017.
J’ai eu le sentiment que nos concitoyens étaient perméables à des raisonnements économiques outrancièrement erronés, sans esprit critique.
Force est de constater qu’l y a un manque d'éducation économique de notre population.
Cette inculture concerne jusqu'aux écrivains et autres personnalités de l'intelligentsia qui interviennent régulièrement à la télévision : dès qu'ils parlent d'économie, le propos devient moins pertinent.
Il est donc nécessaire de former nos concitoyens afin qu’ils deviennent des « citoyens du monde » qui comprennent les mécanismes économiques de base.
Il faut aborder des questions concrètes et simples telles que :
Quelles seraient les conséquences économiques d'une sortie de l'euro ?
Quels sont les effets directs et indirects d'une relance budgétaire ?
Les mécanismes de base doivent être assimilés, comme dans les autres disciplines enseignées. Ensuite, on peut critiquer le système ; pas avant, pas sans compréhension, pas sans connaissance, pas sans raisonnement, pas sans fondamentaux, pas n’importe comment  et
Il faut absolument qu'un socle de base soit maîtrisé. Or, malheureusement, souvent, ce n'est pas le cas.
Il faut procéder à une évaluation rigoureuse des programmes d’enseignement de l’économie dans notre pays et les réformer.  
Il ne s’agit pas, à mon avis, de déchirer les programmes existants. On peut s’appuyer sur les acquis et sur les réflexions menées précédemment. En particulier, le rapport Guesnerie, rapport de 2008 remis à l'ex-ministre Xavier Darcos qui contenait déjà d'excellentes idées Donc nous disposons déjà d’une base. Mais il me parait opportun d'améliorer les programmes en s'inspirant des bonnes pratiques internationales. Répétons le l’élève doit acquérir des bases solides. Cela n’est pas incompatible avec le souci permanent de motiver et d'intéresser les élèves. Chaque sujet étudié devra être imprégné du dialogue entre l'empirique et la théorie mais seulement après que les fondamentaux aient été acquis. On peut imaginer un aspect pratique, voire ludique dans l'enseignement de l'économie avec la mise en situation à partir de cas pratiques ou de jeux de rôles notamment lorsque l'on étudie les interactions stratégiques.
On est en droit de se poser la question de savoir si il possible de former les lycéens valablement si l’on consacre seulement 1 h 30 par semaine aux sciences économiques et sociales en classe de seconde.
Il me semble évident que ce que l'on peut réaliser avec une aussi courte durée par semaine est relativement limité. Mais déjà on peut sensibiliser les élèves aux grandes questions et aux tendances historiques de l'économie. On peut aussi les introduire à certaines notions dont on parle dans les médias : taux d'intérêt, taux de change, taux de chômage, mesures d'inégalités, déficits et dette, etc.
Comment s’y prendre ? On peut certes entrer en contact avec les associations de professeurs de sciences économiques et sociales. Mais il faut aussi que des acteurs de l’entreprise ou des consultants de différentes disciplines soient représentés.
Pour construire le modèle d’enseignement du sujet, il faut prévoir un groupe diversifié apportant des éclairages et des expériences très complémentaires.
On peut espérer que ce groupe élabore un processus constructif à partir de débats sans tabou et sans a priori, prévoyant un matériel pédagogique adapté, ayant le souci commun de former des citoyens capables de raisonner par eux-mêmes et de comprendre le monde dans lequel ils évoluent.
Est-ce que le lycée apprend l’économie aux Français ou leur  apprend à se méfier de l’économie ? La question est iconoclaste  mais elle mérite d’être posée. Car de nombreux  Français ne comprennent rien aux réformes et les « politisent » de façon caricaturale.
L’objectif est de mieux préparer les élèves à poursuivre des études supérieures, lesquelles doivent être aussi entièrement revisitées quant aux programmes et méthodes d’enseignement.

2- Ou sont parmi nos élites des années 2000 les penseurs des transformations, les éclaireurs de l’avenir, les pédagogues du changement face à la troisième révolution industrielle de 1980 ?

Le monde est entré depuis les années 1980 dans la troisième révolution industrielle avec comme intrant la donnée et plus précisément les processus normés et informatisés. Les intrants des deux premières révolutions industrielles de 1780 et 1880 étaient la vapeur, l’électricité puis le pétrole.
Cette troisième révolution industrielle, la France l’a ratée.
En fait l'erreur capitale et fondamentale, aussi dramatique que celle du haut commandement français dans les années 1930 en termes de stratégie militaire, a été de penser que, alors qu'effectivement nous sortions de la deuxième révolution industrielle, nous devions sortir du monde industriel.
Les élites françaises ont pensé que l’on pouvait abandonner le monde industriel au profit du monde des services.
Elles n'ont pas compris qu'on entrait dans une troisième révolution industrielle, qu’on entrait dans l'économie de l'immatériel, de la dématérialisation.
En fait, le système, qui se dessinait était un système hyper industriel basé sur la robotisation et doté de systèmes de production hyper capitalistiques.

La France a fonctionné en sens inverse.
Nous avons cru aux chimères d'une société postindustrielle et d'un territoire sans usine.
Nous avons misé sur une économie de services délaissant aux pays émergeants mais aussi à l'Allemagne et au Japon le soin de produire les équipements et les biens de consommation, dont nous avons besoin.
Nous avons sacrifié la compétitivité sur un modèle de croissance tiré par la consommation sans se préoccuper des équilibres extérieurs.
C'est peu dire que la stratégie de la France n’a pas été la bonne.
Il y a eu un contresens stratégique quasi total sur l’analyse du monde.


Ou sont parmi nos élites les penseurs des transformations en cours, les éclaireurs de l’avenir, les pédagogues du changement ?
Face à ces retards, ces blocages et ces défis la société civile a un rôle à jouer. L'heure est au changement de logiciel dans la sphère politique.
Nos institutions, inspirées par le Conseil National de la Résistance, ont été rédigées pour servir le précédent modèle économique : l’économie fordiste de la deuxième moitié de la deuxième révolution industrielle : économie de masse : masse de travailleurs de la grande entreprise pyramidale, normalisée, hiérarchisée, optimisée, cadencée par l’organisation scientifique du travail, fabricant des produits standardisés, faisant l’objet d’une consommation de masse sur des marchés grand public.
Il faut bâtir les Institutions permettant l’épanouissement et l’équilibre social du paradigme de l’économie numérique du règne de la donnée à l’ère de la multitude, de l’homme augmenté et de l’entreprise étendue, de l’innovation continue et du développement des territoires.

Nous assistons au passage de l'ère de la main d'œuvre du XXème à l'ère du "cerveau d'œuvre" du XXIème siècle.

De ce fait nous entrons dans la vague d'innovation ou destruction créatrice la plus forte de l'histoire de l'humanité.
Ce qu'on nome " numérique" n'est pas seulement une technologie et encore moins un secteur parmi d'autres. Cette informatique optimisée bouleverse la manière de produire et de consommer. Elle permet un rapprochement inédit de l'offre et de la demande. Elle transforme l'intermédiation.
L''homo numericus ne "va «plus seulement sur internet. Il se trouve à l'intérieur de l'écosystème internet. L'action, l'attitude, la place de l'homme siècle sont différentes dans l'économie numérique du XXIème et dans l'économie fordiste du XXème siècle.
L’homme est plonge dans un paradigme nouveau. Ce paradigme impose à l'ensemble de l'économie un changement de fonctionnements, usages et de méthodes. Elles sont directement liées à la mise en réseau des individus.
À terme, toute l'économie sera informatique et dominée  par des entreprises numériques, qui capteront l'essentiel de la création de valeur ajoutée dans des chaînes de valeur recomposées.
 

Il est indispensable de  mieux nous préparer à la société du « tout numérique »

La radicalité des changements technologiques nous impose de revoir nos systèmes d'éducation. Il nous faut anticiper l'automatisation du travail afin de ne pas fracturer davantage nos sociétés.

Notre époque est celle de grands bouleversements. L'équilibre du pouvoir mondial bascule, le contrat social propre à la démocratie et aux économies libérales est sous pression, nous sommes face à une révolution numérique qui change nos modes de vie et de travail.
Selon McKinsey,  près de la moitié du travail humain pourrait être automatisé. De nombreux emplois ne seront que partiellement automatisés, l'homme cohabitant avec les machines. D'autres professions seront entièrement supplantées.
Entre 2016 et 2030, environ 400 millions de travailleurs - 15 % de la main-d'oeuvre mondiale - pourraient être concernés, pas uniquement ceux dont les tâches sont routinières et répétitives, mais aussi les professions libérales et les métiers manuels.
Les avancées technologiques ont un énorme potentiel.
Le vieillissement de la population et la baisse des taux de natalité pèsent sur la croissance mais en compensation la technologie peut stimuler la productivité et la prospérité mondiale. L'apprentissage automatique et l'intelligence artificielle améliorent  notre potentiel à exploiter les données pour résoudre les problèmes les plus urgents et les plus ardus, comme les maladies infectieuses et le changement climatique.

Nous assistons à une révolution des compétences

Il est inévitable que les compétences nécessaires sur le marché du travail changeront considérablement dans les années à venir. Il faut préparer les étudiants à ce nouvel environnement.

3- Face aux métamorphoses du monde, les économistes se montrent impuissants.

Il semble qu’ils doivent changer radicalement leurs représentations théoriques, anciennes, inefficaces.

Au sortir de la Grande Dépression des années 1930, la science économique avait inventé  Keynes et complètement transformé l'action publique en ce qui concerne la fiscalité et la monnaie avec Roosevelt.
Après la crise de 2008, d'une ampleur équivalente, quels ont été les changements du même ordre ? Quelle métamorphose intellectuelle, institutionnelle et politique a eu lien?
En fait. Rien. Les banques ont été sauvées,. Mais tous les problèmes restent pendants.

- Le commerce. Donald Trump fait du libre-échange la cause des malheurs du peuple américain. Tous les pays excédentaires sont alignés, Chine, Japon, Allemagne.
Les économistes déplorent et prédisent le pire. Ils ont raison sans doute mais pourquoi  ne nous ont-ils pas prévenus que  la mondialisation allait faire tant de  perdants.
Lesquels perdants alimentant les votes populistes.
Que faut-il faire ? De l'éducation répondent-ils. Elever le niveau général.
Mais la Chine, l'Inde et le monde procède de la même manière. Alors où sera notre avantage comparatif ? Et que faire des gens qui n'ont pas le niveau et ne sont pas capables  de l'avoir ?
Les populistes prennent le pouvoir à grande vitesse parce que les économistes n'ont pas trouvé comment réformer le commerce international pour faire moins de dégâts. Les échanges touchent maintenant les normes et les standards par exemple alimentaires, autrement dit les styles de vie.
Or les populations des démocraties occidentales veulent préserver leur style de vie. Comment faire ? Les économistes n’ont pas de réponse.

- L'immigration. Les économistes nous disent que la grande question du futur sera la mobilité. Tout change vite, il faut s'adapter en permanence.
Mais la migration, n'est-ce pas la mobilité par excellence ?
L’homme se rend là où il y a des subsistances Il procède de même depuis la nuit des temps. Au nom de quoi l'interdire soudainement ? Au nom des Etats, disent les populistes.
Les économistes savent que l'Etat, forme institutionnelle héritée du XIXe siècle est moins efficace face aux défis d'aujourd'hui : climat, finance, neurosciences. Et ce du fait d’une perte de souveraineté et d’un endettement.
Alors quelle est la solution économique pour éviter que les « perdants » n'en arrivent à voter pour ceux qui promettent de construire des murs pour se protéger ? Les économistes n’ont pas de réponse.
- La technologie. La plus faible des réponses des économistes aux métamorphoses concerne la technologie. Celle-ci bouleverse tout pourtant les statistiques de productivité ne le constatent pas. Le paradoxe divise la profession qui a trouvé comment le qualifier, « la stagnation séculaire », mais qui ignore tout des voies pour nous en sortir.
- L’intelligence artificielle. Le vide de réponses concerne aussi ce formidable défi. 
N'ayez crainte disent les économistes, il y aura toujours des emplois.  Tant mieux. Mais lesquels ?
Les emplois très qualifiés et ceux tout bas de gamme.
Et les autres emplois ? Réponse imprécise pour la classe moyenne. Or cette dernière concerne la majorité des gens et leur peur du déclassement les amène à voter populiste.
Les inégalités sont-elles, en conséquence, vouées à toujours grandir et à creuser l'écart entre une élite et le peuple ?

Le fond de l'affaire, il me semble, est que les économistes vivent sur un modèle de référence, l'équilibre général dynamique stochastique, DSGE en anglais, hérité de lord Keynes.
Il est enseigné aux étudiants de la discipline. Certes, il a été modifié dans les années 1970 pour répondre à l'inflation et élargi.
Il faut admettre qu'il ne fait pas commettre que des erreurs.
Le sauvetage des banques par la politique monétaire en 2008 a permis d'éviter les horreurs des années 1930. La crise financière a été arrêtée.
Mais il est supposé donner la réponse à tous les niveaux, ménages, entreprises, Etats, à partir de la rationalité des choix : les gens suivent toujours leur intérêt.
Or, la réalité « comportementale » est bien plus complexe.
Aujourd'hui le modèle « fonctionne mal », reconnaît Olivier Blanchard, ancien chef économiste du FMI, qui est aux avant-postes des essais de reformulation théorique de la science économique (1). La recherche se fait maintenant vers l'explosion en plusieurs modèles suivant les objectifs.
Mais les économistes sont très loin de disposer d'un nouveau corpus théorique en état de marche.
La question du risque, pour la finance comme pour un ménage, reste mystérieuse. La contagion est nulle puis soudaine, non linéaire donc, c'est-à-dire difficilement modélisable.
La méthodologie change avec les data, les données, pour vérifier les hypothèses micro, mais le retour à la théorie reste à faire parce que le métier d'économiste doit s'ouvrir aux autres disciplines psychologie par exemple.
Bref, tout est encore très incertain.

lundi 30 juillet 2018

Core : un autre enseignement de l'économie est possible

Enseigner l’économie autrement et (re)donner le goût pour cette discipline aux étudiants. Telles sont les ambitions de CORE, un nouveau cours et son manuel élaborés par des professeurs d’économie du monde entier, parmi lesquels Yann Algan à Sciences Po. Objectif de ce cours : montrer que l’économie, jugée souvent trop abstraite et théorique, peut contribuer à résoudre les problèmes et les crises du monde réel.
Quel est le problème le plus urgent que les économistes devraient traiter ? 
Le chômage, le changement climatique, l’instabilité financière, les inégalités répondent en masse les étudiants du monde entier quand on leur pose la question.
Face à cette attente, les cours d’économie déçoivent, voire détournent les étudiants de la matière. “Lors de la crise des subprimes en 2008, raconte Wendy Carlin, professeure d’économie à UCL (UK) et co-fondatrice du projet CORE, les étudiants en économie avaient honte. Ils rentraient chez eux pour fêter Noël et se trouvaient incapables de répondre aux questions qu’on leur posait.”

Un enseignement jugé trop théorique et trop réducteur

De ce constat est né en 2016 le projet 2016 CORE (pour Curriculum Open-access Resources in Economics).
Si les citoyens du monde, et en premier lieu les Français, sont si critiques vis-à-vis de l’économie, c’est sans doute que son enseignement actuel en est, pour partie, responsable. “L’enseignement de l’économie est fortement remis en cause dans le monde entier, et plus particulièrement en France, car il est jugé trop théorique, trop éloigné des grands enjeux contemporains, et trop réducteur sur les comportements humains”, explique Yann Algan, économiste et professeur à Sciences Po Paris et l’un des auteurs du projet CORE.
Mené par une équipe de chercheurs et enseignants du monde entier, CORE a déjà été utilisé dans une centaine d’universités dans le monde.
“La plus grande des résistances au changement, poursuit Yann Algan, est l’absence d’alternative.” Pour faire changer concrètement les choses, il fallait un nouvelle approche pour enseigner l’économie - c’est l’objectif de CORE - mais aussi un outil immédiatement utilisable dans les salles de cours : cours : il s’agit de l’e-book The Economy.
Un manuel en ligne, gratuit et accessible à tous, dont la version française, intitulée L’Économie vient d’être publiée et que les étudiants de Sciences Po et de Toulouse School of Economics utilisent déjà en cours.
Pour mieux répondre aux attentes des étudiants, ce nouvel enseignement prend le contrepied des manuels classiques, avec une idée simple : étudier la réalité.
La réalité des être humains, d’abord, capables à la fois de calculer leur intérêt mais aussi de coopérer et de se montrer généreux.
Rien à voir donc avec l’homo œconomicus abstrait dépeint dans les manuels que la plupart des étudiants utilisent.
La réalité du monde d’aujourd’hui, ensuite, en intégrant les découvertes récentes de la recherche en économie, qui aborde les problèmes liés à l’environnement, à l’instabilité économique, ou aux inégalités.
La réalité d’une science humaine et sociale, enfin, qui n’est pas un objet isolé mais s’enrichit des apports du droit, de l’histoire, de la sociologie.  
“On ne comprend pas l’entreprise si on ignore le pouvoir, la politique ou le droit social”, relève Samuel Bowles, autre co-fondateur de CORE et professeur au Sante Fe Institute (USA).

Ainsi refondé, le cours d’économie se tourne vers la résolution de ces problèmes. Et ne se borne pas à opposer les analyses des grands auteurs présentées comme inconciliables pour toujours : “On ne se contente pas de juxtaposer et de comparer Marx et Keynes, explique Samuel Bowles. On les intègre pour créer un nouveau paradigme”.
Prochaine étape pour CORE en France : une adaptation au programme de lycée, qui sera pilotée par Sciences Po et testée dès l’été prochain via le programme “Premier campus” et les Conventions éducation prioritaire.
“Je me réjouis de l’engouement suscité par CORE à travers le monde, conclut Yann Algan. Nous appelons nos collègues universitaires à participer au projet pour poursuivre l’ambition du programme de redonner aux étudiants et à la société civile le goût de l’économie comme science humaine au service du bien commun.”
Lire le communiqué de presse du 30 mai 2018
*À propos de CORE : Curriculum Open-access Resources in Economics
Le projet CORE regroupe une équipe internationale de chercheurs et enseignants du monde entier sous l’égide de Samuel Bowles (Santa Fe) et Wendy Carlin (UCL). Des cours basés sur CORE ont déjà été enseignés comme introduction générale aux sciences économiques dans plus d’une centaine d’universités dans le monde. Depuis son lancement en 2016, CORE compte plus de 60 500 utilisateurs de 186 pays et plus de 6100 enseignants de 131 pays. La version papier de l’eBook en anglais a déjà été rééditée six fois pour tenir compte de la demande. Des traductions en farsi, en italien, en espagnol, en portugais, ainsi qu’une adaptation pour l’Asie du Sud-Est sont en préparation. Un site internet a été lancé en septembre 2017 et un nouveau projet adapté à un public de non spécialistes en économie a récemment été développé par 20 universités.


vendredi 27 juillet 2018

La souveraineté numérique


Dans le domaine de la souveraineté numérique, il nous faut lucidement regarder la situation dans laquelle nous nous trouvons, nous européens et nous français bien sûr dans le domaine de la souveraineté numérique.
Nous avons avec constance échouée à devenir une puissance numérique.
Nous avions le premier fabricant mondial de téléphones Nokia. Il a été démantelé en l'espace de cinq ans.
Nous avions de grands opérateurs dans pratiquement tous les domaines des technologies.
Aujourd'hui l'essentiel des technologies clés pour l'avenir, qu'il s'agisse des technologies cloud, de l’intelligence artificielle, des nanotechnologies et nous pourrions continuer la liste nous européens n'existons pas
Nous avons de bons cerveaux. Mais ils participent grandement à l'édification des GAFA par exemple en intelligence  artificielle. Et nos cerveaux se font très largement aspirer par la Silicon Valley et par les BATX Chinois.
Nous n'existerons pas tant  que nous n’aurons pas d'existence industrielle.
Toute forme de réflexion politique, stratégique sur l'indépendance ou la souveraineté n'aura de sens que si elle s'appuie sur un renouveau industriel. Or pour l'instant il n'existe pas.
L'objectif n'est pas de dresser un tableau trop sombre. Mais il faut en prendre la mesure.
La souveraineté est le droit absolu d’exercer une autorité législative, judiciaire et administrative sur un pays ou un peuple. L’entrée dans le cyberespace a aboli les frontières et les barrières en tous genres. Internet, le big data, les interconnexions, et les algorithmes complètent la libre circulation des marchandises par celle de la connaissance et multiplient nos capacités d’analyse et de compréhension. Il est donc possible de contrôler les échanges en permanence, pour détecter les failles et les dérives, et de gérer les flux à travers des logiciels de plus en plus performants.
La France est à la croisée des chemins. Après avoir longtemps affirmé sa souveraineté, elle s’est jetée à corps perdu dans la mondialisation. Il est aujourd’hui clair que le fonctionnement n’est pas idéal et que cela favorise la montée des extrêmes.
Il faut trouver une autre voie plus réaliste mais aussi plus ambitieuse. Cela suppose de réfléchir à l’évolution du monde, de se doter d’une politique volontariste pour exploiter les opportunités et s’y tenir. Le destin de la France dépend désormais de sa capacité numérique.
A l’ère de l'Internet des objets connectés, de l’Intelligence artificielle et de la blockchain, la vision naïve d'un numérique libertaire est devenue dangereuse.
Il est grand temps que la France se dote d'un véritable et ambitieuse politique de souveraineté numérique. Notre avenir repose sur le réalisme et non sur un dogmatisme idéologique périmé.
Quelle stratégie industrielle mettre en place pour une cyber sécurité souveraine ?
Quel enseignement supérieur et quelles formations au service d'une cyber sécurité souveraine ? et de nombreuses autres questions seront abordées le 27 juin 2017 par des intervenants prestigieux tels que Louis Pouzin, père de l’Internet et Olivier Itéanu avocat à la cour d’appel de Paris et auteur du livre « Quand le digital défie l’Etat de droit ».
 La souveraineté numérique est l’un des sujets stratégiques essentiels de ce début du XXIème siècle.

Pour l’aborder, il est indispensable de conduire une réflexion sur les fondements de notre économie, de notre culture et de notre système politique face au paradigme de l’économie dite « numérique » ou « digitale ».  Cette économie est en fait une économie informatique anthropologique.
Il faut à mon avis rapprocher les sciences de l’ingénieur des sciences politiques.
C’est la raison pour laquelle j’ai souhaité organiser une Journée sur la Souveraineté numérique.
J’ai voulu cette manifestation. Sciences Po avec l’appui de Forum Atena l’a permise.
Diplômé de cette école, j’ai reçu le meilleur accueil. Jean-Noel Poli Directeur des Achats des Services Généraux et de l’Immobilier a mis un amphithéâtre à notre disposition. Il nous a présenté le projet SciencesPo Campus numérique 2022.
Benoit Thieulin Co-Doyen de l’Ecole du management et de l’innovation de Sciences-Po, ancien Président du Conseil national du numérique a conclu le colloque.
Frédéric Mion, Directeur de Sciences Po, Jérôme Guilbert Directeur de la communication, Olivier Duhamel, Président de la Fondation des Sciences politiques, Pascal Perrineau, Président de l’association des anciens élèves ont été informés de l’événement et l’ont encouragé.
Bruno Gautier et moi-même avons assuré l’organisation. Hubert Chartin et Richard Toper, dirigeants de Wawetel et de Setics, ont sponsorisé le cocktail.
Quelles doivent être les implications des décideurs politiques et économiques face à la souveraineté numérique ? Quelles mesures prendre pour protéger les données des citoyens et des entreprises ? Comment réussir une cyber sécurité souveraine ? Quels enseignements supérieurs et quelles formations spécialisés et généralistes au service de ces ambitions ?
Nous avons choisi vingt cinq intervenants d’horizons variés. Quatre Key notes, deux tables rondes, un atelier collaboratif, trois pitchs, une conclusion (voir annexe).
La souveraineté de l’homme, la souveraineté de l’entreprise, la souveraineté de l’Etat sont mises à l’épreuve par les possibilités du numérique.
Comment le citoyen, peut-il rester souverain de sa propre vie quand à partir des données qu’il laisse sur internet, il est tracé, surveillé, influencé, positivement certes mais aussi négativement ?
Comment l’entreprise peut-elle être souveraine dans sa stratégie quand elle ne peut pour survivre se passer d’un système d’information et que par définition ce système d’information est vulnérable ?
Quel sens peut encore avoir la souveraineté de l’Etat ? Rappelons que la souveraineté est le droit d'exercer une autorité législative, judiciaire et administrative sur une nation ou un peuple. La Monarchie de droit divin, puis la République ont légitimé cette souveraineté.
Internet, le Big data, les interconnexions, et les algorithmes complètent la libre circulation des personnes et des biens par les échanges virtuels au sein de la société de l’information et de la connaissance.
Le monde contemporain entre dans le règne de la donnée à l’ère de la multitude.
A l'ère de l'internet, des objets connectés, de l'intelligence artificielle et de la blockchain, il est grand temps que la France se dote d'une véritable et ambitieuse politique de souveraineté numérique. Aujourd’hui le destin d’un pays dépend de sa capacité numérique.
On ne doit pas limiter le sujet à la mise en valeur de ses start-up.
Certes une dynamique entrepreneuriale forte liée à des acteurs privés est positive.
De nombreux jeunes diplômés français souhaitent créer une start-up. Pour eux, c’est le graal. Dans ma génération, il était conseillé de démarrer sa carrière dans un grand cabinet d'audit.
Je suis un ancien de PriceWaterhouseCoopers. Bien. Il faut encourager l’attitude de ces jeunes parce que ce sont eux qui créent la France de demain. Il faut saluer aussi la création du label « French Tech ».
Mais ce n’est pas suffisant. La première ambition du pays doit être de construire une véritable souveraineté numérique.
Il faut donc bâtir les Institutions permettant l’épanouissement et l’équilibre social du paradigme de cette économie du règne de la donnée à l’ère de la multitude, de l’homme augmenté et de l’entreprise étendue, de l’innovation continue et du développement des territoires. Permettre l’élaboration démocratique et la mise en place de ces Institutions est le rôle des politiques.
Les enjeux de souveraineté numérique sont capitaux. Le risque pour la France et l’Europe de devenir des « colonies numériques » des continents américains et asiatiques est réel.
Face à cette question essentielle et stratégique, parmi les 577 députés et les 348 sénateurs, lors de la dernière législature, une vingtaine s’y intéressaient ; et aucun n’avance de solutions réelles pour faire pièce aux géants technologiques américains et asiatiques. Pourtant face aux technologies numériques, dont le potentiel de transformation n’est qu’au tout début, les opportunités sont vastes et les menaces énormes.
Depuis une vingtaine d'années les services développés sur Internet et grâce à Internet changent notre quotidien.
Accès à la gigantesque base de connaissances qu'est Internet grâce à Google, connexion des individus dans le monde entier grâce à Facebook et LinkedIn, accès en ligne dans le domaine culturel des images et des musiques grâce à Youtube, mise en valeur des offres d'hébergement grâce à Brookings et Airbnb, développement du e-commerce grâce à Amazon.
Tous ces géants de l'Internet que nous utilisons sont majoritairement  américains.
Chacun d'entre eux connait beaucoup de nous-mêmes grâce aux données qu'il collecte en permanence sur nos comportements et aux algorithmes, qui les raffinent.
Une deuxième phase arrive. C’est celle de l'intelligence artificielle, des robots intelligents et des objets connectés. Si l’histoire de l'Internet se poursuit sous le même modèle que celui de ces dernières années, nous mettrons purement et simplement notre vie personnelle et collective ainsi que celle des états entre les mains des Américains puis après une reconfiguration aussi entre les mains des Chinois.
Est-ce une provocation que de dire : finalement pas besoin de protection particulière car nous donnons déjà tout volontairement ? Pourquoi chercher à faire de la cyber sécurité ?
Volontairement pour pouvoir utiliser ces services nous donnons accès à nos données.
En plus nous ignorons sur quels territoires sont hébergées nos données via des datacenters.
La souveraineté numérique passe donc par une maîtrise industrielle, par la production des données à l'échelle européenne. Il me semble difficile d’agir sur ce sujet à 27.
Il faut revisiter l'ambition européenne. On peut imaginer la construction en bilatéral avec l'Allemagne d'un espace numérique homogène. Cet espace prévoirait une réglementation identique entre les deux pays, avec une vision éthique de la vie privée et de l'usage de l’utilisation des données et des algorithmes de l'intelligence artificielle. Cet espace serait le lieu de la réflexion de la place de l'homme dans le monde numérique.
Notre pays doit avoir aussi une ambition industrielle numérique. Dans ce cadre il faut renforcer l'industrie de la cyber sécurité et de la cyber défense.
Ces propos ne concernent pas uniquement des intérêts économiques mais aussi des choix de société.
Face à la prise de décision par des algorithmes d'intelligence artificielle, nous devons définir quelle sera la place de la décision humaine, quelles seront les règles communes de vie dans notre société, quelle sera la place de la vie privée et de la solidarité.
Les réponses à ces questions n'ont pas à être données par les américains ou les asiatiques à notre place.
Ce serait délaisser la vision de notre société à d'autres. Ce serait un abandon complet de notre culture, de notre indépendance, de nos libertés et de notre avenir.

Programme de la Journée Souveraineté Numérique à Sciences Po le 27 juin 2017
Key note 1 : Le regard de Louis Pouzin, père de l’internet. Fondateur d’Open-Root, libérateur de noms de domaine. Quels sont nos moyens de souveraineté numérique ?
En matière numérique les Etats européens sont devenus des colonies. Pourtant une kyrielle de moyens sont utilisables pour éroder la dominance étasunienne.
Key note 2 : Pascal Picq, paléoanthropologue, maître de conférences au Collège de France.
Key note 3 : Jacques Cheminade, Homme politique et Essayiste.
Le numérique au service du financier ou de l’humanité ?
Key note 4 : Grichka Bogdanoff  Ecrivain scientifique : Les ordinateurs quantiques vers une révolution numérique.
Table ronde 1 : La souveraineté numérique comment la piloter ? Quelles gouvernances ?
animée par Geneviève Bouché, Futurologue. Rapporteur : François Charles Président de l’Institut de Recherche et de Communication sur l’Europe.
• Michel Maffesoli, Professeur Emérite à la Sorbonne. Sociologue. Administrateur du CNRS. Auteur du livre « La postmodernité à l’heure du numérique. Regards croisés sur une époque ».
• Patrice Noailles-Siméon, Directeur des études du eFPI Forum Européen des Politiques d'Innovation et secrétaire Général du Collectif Innovation
Pour une co-Gouvernance de la Souveraineté Numérique
• Manuel Géa, Président fondateur de Centrale Santé, CEO Bio-Modeling Systems
• Christian de Boissieu, Professeur à l'Université de Paris (Panthéon Sorbonne) et au Collège d'Europe (Bruges), Membre du Collège de l'AMF
• Muriel Touaty, Directrice Générale Technion France Israel Institute of Technology.       Comment l’esprit d’innovation, le monde de la recherche et les technologies de pointe peuvent aider un pays à permettre sa souveraineté numérique.
Table ronde 2 : La souveraineté numérique : levier majeur de notre compétitivité ? Subir ou agir ? Analyse prospective autour de thématiques économique, sociale et juridique.
animée par Dominique Chauvin, Prospectiviste. Rapporteur : Henri Peyret Principal Analyst Forrester Research. Responsable de la communauté des architectes d’entreprises pour Forrester.
• Olivier Iteanu, Avocat à la cour d’appel de Paris. Auteur du livre « Quand le digital défie l’état de droit ».
La constitution de l’internet est elle la constitution américaine ?
• Francis Jutand, Directeur Général adjoint de l’Institut Mines Télécom
• Alain Bouillé Directeur Sécurité des Systèmes d’information Groupe Caisse des Dépôts
• Fabrice Epelboin Enseignant à SciencesPo et CMO & Cofonder de Yogosha Plateforme de cybersécurité collaborative.
• Michel Canevet Sénateur-Maire de Planéour Lanvern
- Atelier collaboratif : Outils et méthodes : Quelles alternatives ? Construisons notre souveraineté. Eric Leandri, Président fondateur de Qwant moteur de recherche français
- Trois pitchs :
Fabrice Epelboin CMO & Cofonder : Yogosha Plateforme de cybersécurité collaborative
Stephane Cachelin Inventeur Mobilier urbain Objets connectés « Le Chapotelet » Médaille d’or du Concours Lepine
Jacques H Paget, avocat, expert en négociations, illusionniste  Le pouvoir de l’illusion, la force de fascination.
Clôture : Benoit Thieulin Co-Doyen de l’Ecole du management et de l’innovation de Sciences-Po, ancien Président du Conseil national du numérique.

  Une poignée de géants numériques sont lancés dans la course folle des 1.000 milliards de dollars de capitalisation boursière. Il faut s'interroger sur les ressorts qui créent de telles rentes.
Ce sont les nouveaux monstres engendrés par Wall Street. Une poignée de géants bien connus sous le nom de GAFAM - Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft - sont lancés dans une course folle : être le premier à atteindre la barre des 1.000 milliards de dollars de capitalisation boursière. Ils n'en sont plus très loin. Et cette compétition est très représentative au fond de ce qu'est devenue notre économie.
Au siècle dernier, les industriels de la deuxième révolution industrielle de 1880 ont longtemps dominé la bourse : General Motors dans les années 1920, du Pont de Nemours et Standard Oil  dans les années 1950, Genéral Electric dans les années 1980.
Leur règne n'a été interrompu qu'au cours des grandes percées technologiques : les télécoms avec AT$T dans les années 1920, l'informatique avec IBM dans les années 1960 ou Microsoft dans les années 1990.
Aujourd'hui tous les élans sont numériques. Les GAFAM  sont évidemment les fruits de la révolution digitale.
Mais ils sont aussi le produit de la mondialisation triomphante qui a permis à Apple d’écouler 300 millions d'iPhone en Chine ; le produit de la plateformisation qui donne à Google et sa filiale Youtube 4 milliards de vidéos regardées chaque jour ; le produit du phénomène du « Winner takes it all » qui donne un avantage considérable au premier entrant : Facebook a mis quatre ans à conquérir 50 millions d'utilisateurs (il en revendique désormais 2 milliards) quand l’automobile avait mis 62 ans, la télévision 22 ans et les ordinateurs 14 ans.
On pourrait ainsi multiplier les chiffres spectaculaires. Il donne une idée de la formidable accélération des deux dernières décennies, période durant laquelle je me suis engagé dans l’intelligence économique en France et  j’ai poursuivi mes recherches et mes réalisations en stratégie d’entreprise.
Ces faits et ces chiffres doivent nous amener à nous poser un certain nombre de questions.
- On ne peut d'abord que faire le constat que ces mastodontes sont tous d’origine américaine.
Leurs concurrents chinois ne sont pas loin derrière. Aucune trace en revanche d'un grand acteur européen. Les GAFAM sont nés aux États-Unis, ont grandi dans la Silicon Valley et impose désormais leur hégémonie numérique partout dans le monde.
L'Europe est dramatiquement absente de cette guerre technologique.
- Il faut ensuite s’interroger sur les ressorts qui permettent de créer de telles rentes.
Car ces géants ne sont pas seulement en train de dominer la planète boursière.
Ils colonisent aussi nos vies privées et maîtrisent la diffusion de l'information.
Ils sont devenus maîtres en matière d'optimisation fiscale.
Ils captent les innovations grâce à leur puissance financière.
Ils sont en train de dessiner notre futur en investissant dans l'intelligence artificielle ou la bioéthique.
Ils sont au fond devenu les nouveaux souverains, en passe de concurrencer les Etats.
Et le jour viendra où ils créeront leur propre monnaie pour affirmer encore leur autorité.
Qui pourra alors les contrôler ?